Cessez d’innover.
Pourquoi vous casser la tête à tenter chaque jour de vous renouveler et de vous réinventer. Ç’est trop compliqué. Et surtout inutile. Copiez. C’est la façon la plus économique de progresser dans ce bas monde. Laissez aux autres les tracasseries créatives, les nuits blanches, les essais infructueux. Stop. Ne vous embarrassez pas du concept de recherche et développement, laissez ça aux autres. Allez-y pour du sûr, du concret, du roc. Allez-y pour la facilité. Copiez votre concurrent. Y’a pas mieux. C’est génial! Pompez le jus d’un autre est une source commode d’évoluer à peu de frais. Vous n’êtes pas le premier? Qui s’en soucie? Ne vous laissez pas impressionner par les beaux parleurs qui vous disent qu’il vous faut innover pour survivre. Ces beaux parleurs qui vous disent de ne pas vous arrêter d’améliorer votre produit. Fiez-vous à moi. Stop. Arrêtez tout ça. Vous voulez des arguments irréfutables pour vous convaincre? Les voici :
1. Tout a été inventé. Voyez la réalité en face et cessez de chercher, il est impossible de créer quoi que ce soit de nouveau. La cour est pleine. Prenez le domaine musical par exemple, les artistes l’ont compris rapidement en cessant de créer du matériel original et en se lançant dans la reprise; ça c’est du concret, du sûr et en plus si c’est téléchargé, on s’en fout ce ne sont pas leurs droits d’auteur à eux.
2. Si c’est bon pour les autres, ça le sera pour vous aussi. Regardez votre concurrent et analysez ses produits, prenez ceux qui les distinguent de vous et faites de même. C’est génial. Simple et économique. Mon restaurant de sushi préféré (Temaki, rue racine) a créé une pizza sushi (galette de riz, mayo, poisson), qui est un délice; son concurrent (pas en qualité, je vous assure) plus loin sur le boulevard Talbot en fait lui aussi maintenant! Super! Génial! Pourquoi pas? Recherche et développement : 0. Investissement : 0. Que du plus. Du positif. Du concret.
3. Les gens adorent qu’on les prenne pour des cons. Surtout les consommateurs. C’est connu, le consommateur moyen comme vous et moi est un idiot. Il ne sait pas faire la différence entre un truc original et une copie. Au Québec, on adore le réchauffé, les reprises, les concepts européens ou américains remâchés, mais encore plus les concepts de nos voisins directs. N’est-ce pas génial? N’est-ce pas ce que l’on veut entendre comme commerçant? Imaginez toutes les avenues qui s’ouvrent soudainement… On vous attribuera le mérite de concepts empruntés… et ça ne vous coûtera rien pour le développer! S-U-P-E-R!
4. Pourquoi risquer de se tromper. Personne ne veut perdre son temps et son argent à essayer des nouveaux trucs. C’est trop risqué. Ça pourrait ne pas fonctionner. Imaginez l’opinion publique. Ce qu’on dira sur vous. Le plaisir de l’un, c’est d’ voir l’autre se casser l’ cou disait Leclerc. Laissez aux autres le gambling créatif. Sauvez votre mise. Passez go et réclamez 2oo$. Sans investissement.
5. On est les meilleurs. Dans tout. Il faut arrêter de se voir petit. Nous sommes Big. Faites le tour du monde et vous verrez que nous sommes au dessus de la pyramide. Les gens nous envient. Et quand on les meilleurs au monde, on n’a aucune raison valable de s’améliorer. À la limite, c’est quasiment insultant pour les autres si on décidait de rehausser la qualité de nos produits. Peut-on améliorer l’excellence?
Vous vous sentez plus rassurés maintenant? Parfait. Super. Imaginez tout le temps que je vous ai fait gagner. Maintenant, ce n’est pas tout. Il faut rester vigilant. Vous êtes peut-être encore fragile. Si l’envie de vouloir réinventer le monde vous revient, prenez une grande respiration, allez vous louer la reprise d’un vieux classique du cinéma (pas l’original, c’est même pas en HD!!) et relaxez. Vous verrez, ç’est difficile au début, mais vous serez convaincus des bienfaits de cette nouvelle philosophie quand vous verrez vos concurrents copier votre style de gestion.
Max
29 novembre 2009 at 15:05 //
Bien d’accord… On est suffisamment bien dans nos années 2000! Downloader Boom Desjardins qui chante les BB, aller voir Facebook directement sur son cellulaire et regarder Le Mur à V, me semble c’est assez pour etre heureux! Quoique… j’aurais bien aimé un jour avoir un skate qui vole. Ca l’air que je me contenterai de réécouter Back to the Future, quand il sortira en HD.
Merci sincèrement de simplifier notre vie
marc
29 novembre 2009 at 22:42 //
@ Max
… faut surtout pas oublier d’aimer uniquement ce que l’on dit d’aimer : musique, bouffe, livre. Ne jamais faire de découvertes. Se fier uniquement au top 10. Si possible. 🙂
Ironie, quand tu nous tiens… 🙂
Martin Larose
1 décembre 2009 at 16:38 //
C’est un mal de société…
Je vais te parler de ce que je connais.
Dans notre merveilleux monde de l’éducation, nous faisons face depuis quelques années à un problème sans cesse grandissant et qui commence à nous exploser au visage, i.e. le plagiat électronique.
à partir des données récentes qui nous sont disponibles, je te donnerai cet exemple probant:
En 1964, 58% des étudiants québécois en génie affirmaient avoir plagié au moins une fois.
En 2009, c’est plus de 85%!
Il existe des services en ligne depuis quelques années où, en toute sécurité, tu peux te procurer une thèse de doctorat pour environ 35 000$. Et le plus drôle dans tout ça, c’est que cette «compagnie» t’oblige à te faire signer une lettre d’entente éthique afin que tu ne révèles pas tes sources.
À certains égards, on est de retour au temps de Galilée où les gens avaient peur de se faire exécuter s’ils pensaient autrement.
2 concepts à retenir…
1-Facilité de plagier
2-Peur d’être à contre-courant
marc
3 décembre 2009 at 9:26 //
@ Martin
Tes deux concepts sont intimement reliés : la peur d’être à contre-courant te force à plagier ce que les autres font pour t’assurer d’être mainstream. Je ne comprends pas. C’est tellement plus gratifiant d’être dans la marge. D’être différent. De ne pas être un numéro. La routine m’ennuie. Je ne comprends même pas les gens qui planifient leurs repas de la semaine, imagines-tu? Je sais rarement ce que je cuisinerai le jour même. Savoir que sa vie est réglée, que je roule sur la petite voie de service pépère jusqu’à la retraite est un cauchemar. Let’s rock!
Martin Larose
3 décembre 2009 at 11:32 //
@Marc
Parfaitement d’accord avec toi…et mes lectures de master me permettent de mieux comprendre. C’est notre héritage, c’est dans notre sang…qu’on le veuille ou non. Les pays et les peuples qui innovent en font une tradition et une manière de vivre collectivement. Pourquoi? Parce que ces peuples, au fil des siècles, se sont débarassés des peurs qui freinent l’innovation. Pour moi, après 2 ans de recherche sur le sujet, il n’y a aucun doute dans mon esprit.
Moi aussi je préfère être dans la marge (et Dieu sait que je pourrais t’en écrire un tome ou 5), aller en terrain inconnu, essayer, tester, faire exploser, rater, recommencer…mais malheureusement, ce n’est pas en nous…pour l’instant…
Fais le test suivant et tu verras que je dis vrai…
Invite des amis à souper, ou à prendre un verre (c’est même mieux, ils parleront plus facilement). Après une trentaine de minutes, en fait, après la première consommation, propose-leur de manière anodine un sujet tel que la construction d’ une voie ferroviaire rapide (TGV) entre Chicoutimi et Québec, des complexes hôteliers de luxe en plein milieu de la fôret boréale, parle-leur d’artistes régionaux que tu crois novateurs, ou même, lance la folle idée de créer ici même au Saguenay une Vallée du papier où les imprimeurs du monde entier pourraient s’approvisionner en papiers hauts de gamme faits avec des produits régionaux. Tu pourrais même leur proposer d’exporter des bois d’ici qui sont très prisés pour la confection d’instruments de musique. (Et je sais de quoi je parle).
Je te paie une bouteille du meilleur rouge que tu veux si tu n’obtiens pas une seule des réactions suivantes:
1-Fou rire
2-Regard désaprobateur ou incrédule
3-Des réponses du style:
a) «C’est trop cher»
b) «Ah oui! Les peuples scandinaves font ça je crois…»
c) «Ça ne marchera pas»
d) «Les gens d’ici n’accepteront pas ça»
e) «Le maudit gouvernement ne nous donnera pas de subventions»
f) «Les Européens eux ils font comme ça…Les Américains eux ils font comme ça…»
Et je te garantis que la conversation bifurquera assez rapidement vers de prochaines vacances dans le Sud ou sur le dernier album d’un artiste brésilien plutôt inconnu dans son propre pays.
Nos voisins du Sud appellent ça le «woodshedding»…i.e., passer une partie de sa vie à creuser, mixer ce qui ne se mixe pas, consacrer sa vie à de la recherche dans la remise arrière du confortable bungalow.
La réponse est dans l’éducation…mais l’éducation de cuisine. Ils faut montrer à nos enfants et nos petits enfants à penser autrement…ce sont eux qui feront la différence…pas nous.