Simili.

Quand j’étais jeune, les murs du sous-sol de la maison familiale étaient en préfini. Une simili planche de bois lignée, d’un huitième de pouce, fixée sur la charpente avec des clous pas de tête, des clous de finition. Dans les années soixante, le marché des maisons unifamiliales explosait. On construisait des bungalows préfabriqués un peu partout dans les banlieues et les régions. L’accès à la propriété était dorénavant accessible à une génération dont les parents n’avaient pas eu cette chance.

Pour arriver à fabriquer des maisons moins dispendieuses, on remplaçait les matériaux nobles comme la brique et le bois, par du clapboard et de l’aggloméré.

Pour imiter et remplacer les boiseries d’antan.

À moindres coûts.

Autour des mêmes années, on a eu droit à du simili jambon. Une pâte de viande grise industrielle auquel on ajoutait de la saveur et de la couleur. Pour faire semblant qu’on mangeait du vrai jambon. Ça se mariait à merveille avec la fausse moutarde fluorescente et le pain blanc tranché qui goutait le gâteau Duncan Hines en poudre.

Dans les années 80, on arborait le perfecto en simili cuir. On voulait se la jouer punk. No Future. Mais avec des Doc Martins qui nous coûtaient la peau du cul. Un walkman qui nous coûtait un bras. Des disques, des spectacles et de la drogue qui mangeaient nos économies. No future. Mais pas un no future de pauvre. Un simili no-future. Des punks de bonne famille. Avec l’aide financière de papa et maman. Et du gouvernement.

Les années 90 ont eu leur part de simili machins aussi.

Comme les années qui les ont suivies.

Au tournant des années 2000, je jouais au golf avec des copains. Il y en avait un qui «oubliait» souvent certains coups. Candidement, quand nous écrivions, sur la carte de pointage, nos scores astronomiques de mauvais golfeurs et que nous perdions la partie au profit d’un menteur, je me disais toujours la même chose : comment peut-il vivre avec l’idée de gagner comme ça.

On savait tous qu’il ne gagnait pas.
Il le savait aussi.
Que tout le monde pense que tu es hot, c’est une chose.
Que toi, tu saches que tu es un loser, il me semble que ça fesse.

Simili gagnant.

Aujourd’hui, avec l’avènement des réseaux sociaux, on est au summum du toc.

Les faux millionnaires.

Les faux bons gars.

Les fausses amies.

Et toute cette pléthore de conférenciers et coachs de vie.

Simili professionnels.

Qui nous donnent de simili conseils à partir de leur simili succès.

Tout ce faux bonheur exposé.

Simili joie.

Les instagrammeurs et leurs photos parfaites.

Retouchées.

Sponsorisées.

Simili perfection.

On berne qui?

Avant tout soi-même.

Et c’est ce qui rend l’aventure encore plus pathétique.

Qu’on veuille être quelqu’un d’autre.

Qu’on veut ne pas être qui on est.

Qu’on veuille que les gens pensent autre chose de nous que ce que nous sommes vraiment.

Simili auto appréciation.

Je ne m’aime pas.

Mais je veux que vous m’aimiez.

Même si c’est un faux amour.

Basé sur une fausse présentation.

Une simili foi.

Un simili soi.

Un simili moi.

4 commentaires

  • C’est si vrai, Marc, c’est si vrai ! Quand on est bien dans ses baskets d’humain imparfait, qui cherche à guérir de ses petits défauts mais qui s’assume, on n’a pas besoin de fausse vitrine de soi…
    On naît, et on est, « comme ça » !
    Plus j’avance dans la vie, plus je me méfie de ceux qui ont pretenduement tout réussi, et en font l’article sans répit.
    Être un homme/une femme accompli(e), est-ce que ça ne serait pas s’accepter comme on est, avec ses bons et ses moins bons cotés, tout en cherchant à progresser ? Sans se surexposer ? Sans usurper d’identité ? En se foutant la paix ?…
    Longue vie à vous, sage homme parmi les fous !

  • Bravo marc,

    c’est un texte qui fait réfléchir. Il ne faut pas se surprendre que les fake news, les simili nouvelles soient acceptées par autant de gens

    Robert

  • Tellement vrai! Il faudra valoriser le vrai, l’authentique, en le restant, avant tout, mais dans notre quotidien.Il faut acheter du vrai, consommer du vrai. Pour que le vrai prenne sa place.et que nous nous sentons à.la bonne place.

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