Chroniques sénégalaises 07 – Le prix
Combien vaut une vie humaine?
Vous vous êtes déjà posés la question? Moi, ça m’obsède depuis que j’ai remis les pieds au Sénégal, il y a maintenant deux semaines. Ne me dites pas que la vie, ça ne se compte pas. Tout se compte. Tout est monnayable de nos jours. Même l’amour. Alors, s.v.p, donnez-moi un chiffre.
Si vous en êtes incapable, laissez-moi vous aider un peu dans vos calculs. Lors de notre première journée de clinique, un jeune homme s’est présenté avec un œil déformé de la grosseur d’une boule de billard. Après investigation, une simple morsure obtenue lors d’une dispute avec son jeune frère a dégénéré avec le temps. Par négligence, mais surtout par manque de moyens, ce stupide incident s’est transformé en tumeur cancéreuse. Prix pour l’opération à Dakar : 100$. Vous vous doutez bien que ce jeune homme et sa famille n’ont pas cette somme. Sans être devin, il est facile de prédire qu’à court terme, il perdra son œil et que cette tumeur ne s’arrêtera pas là. Conclusion, une centaine de dollars suffiraient pour que sa qualité de vie s’améliore. Cent stupides dollars. Une paire de jeans. Un plein d’essence. Un mois de cellulaire. Pour une vie. C’est simple comme calcul. Comme le fait Liam Neeson dans son interprétation d’Oskar Schindler dans le film de Spielberg sur sa fameuse liste, quand il réalise le nombre de juifs qu’il aurait pu encore sauver en regardant ses bagues et sa voiture qu’il avait conservées. Mais nous ne sommes pas devant un écran avec du popcorn, mais devant ce bonhomme avec un œil qui veut lui sortir de la tête.
Voici donc notre réalité, ici, à Thiaré.
Chaque jour, des pathologies bénignes, pour la plupart si faciles à guérir chez nous, se transforment lentement en malaises plus importants pour des centaines, voire des milliers de gens. Rarement pour des sommes astronomiques. Des médicaments à 10$, 20$, 50$. Des interventions chirurgicales du même prix. Dérisoire. Mais y a rien de drôle là-dedans. Rien.
Un étudiant me faisait remarquer qu’il avait perdu l’appétit quand il a réalisé que nos restes de table finissaient dans les assiettes de certains employés du dispensaire. Qu’il avait l’impression que de manger leur enlevait de la nourriture. Une infirmière a fondu en larme quand elle assisté à l’accouchement d’un mort-né causé par un manque de suivi de grossesse. Plusieurs de nous réalisent, chaque jour, que la vie est injuste. Nous réalisons que la vie à un prix, mais n’a finalement aucune valeur sauf celle qu’on lui accorde. Si je suis capable de payer les 100$ qui me permettrait de survivre, est-ce que ma vie vaut plus que quelqu’un incapable de le faire? Serais-je si important dans l’Histoire pour que moi, je puisse me faire opérer plutôt qu’Elage, Ousman ou Bâ. Ma vie a-t’-elle vraiment plus de valeur que la leur?
Oui la misère est mondiale. Des villages comme Thiaré, il en existe des milliers éparpillés sur le globe. Des villages ou la vie tient à rien ou si peu qu’on pourrait la sauver ou l’améliorer avec quelques moyens.
À plusieurs reprises, nous avons voulu nous cotiser pour payer une intervention ou médicament spécialisé, mais nous ne pourrons pas tout réglé et créer des attentes que l’on ne pourra pas toujours combler serait encore pire. Nous tentons du mieux que l’on peut de panser et ce que nous faisons est important, mais nous réalisons bien que c’est le minimum. Que notre retour à la maison laissera cette population comme elle était avant qu’on y foule les pieds. Que les sentiments d’impuissance et de résilience auxquels nous faisons face nous suivront encore longtemps dans notre confort.
C’est le prix à payer quand tu t’embarques dans ce genre d’aventures. Un prix difficile à évaluer. Le prix de la vie.
Tremblay Claire
14 janvier 2012 at 8:12 //
La vie n’a pas de prix!
Comme vous serez enrichi, conscientisé à l’apprécier pour ce qu’elle est, la vie. Cet état d’âme (grandeur) n’est pas monnayable.
Merci pour ce partage.
Claire Tremblay
Claire
14 janvier 2012 at 8:26 //
Mon Dieu ! l’impuissance est grande quand l’on se compare..mais faire ce que vous faites pendant un mois fera la différence dans la vie de 1,5,10 ,100 personnes,c’est peu et beaucoup à la fois.
Chaque geste posé aura un impact sur la vie d’une personne, même un sourire. Merci .
Lucie
14 janvier 2012 at 9:38 //
Je suis touchée par ce que je viens de lire. Je vous admire! Parce que ça prend du courage et un sang froid incroyable pour côtoyer la souffrance et la pauvreté, au quotidien. La vie n’a pas de prix. Vivre, c’est souffrir. La richesse est dans le geste et l’action. BRAVO!
Michel Gauthier (conjoint de Danielle)
14 janvier 2012 at 9:43 //
Je n’en reviens pas des émotions que vous devez vivre pendant votre séjour avec cette population. Je tiens encore à vous dire que nos pensées sont avec vous. Demain, profitez bien de votre journée plage car c’est surement très bien mérité.
Jacinthe Dufour
14 janvier 2012 at 16:17 //
Quelle belle expérience et lecon de vie vous vivez. J’aurais bien aimer partager tout celà avec toi Mélanie, je t’embrasse et pense beaucoup à toi. Ta mère Jacinthe À bientôt
Suzanne
14 janvier 2012 at 17:45 //
Pas face à lire, mais tellement réaliste. C’est ce que je me ditchaque jour, quand j’entends parler des faux problèmes par les gens qui se disent conscient. On ne s’occupe pas des vrairoblème sur cette planète.
Annie Tremblay
14 janvier 2012 at 20:38 //
Dire qu’on entend chiâler parce qu’il fait froid, il neige , température ici, température là! Problèmes ici problèmes là! Claire, Lucie et Suzanne ont raison! Quand on se compare et qu’on prend la peine de regarder autour de nous, on voit qu’on ne regardait pas les vrais problèmes. On est tous entouré d’humains, une consoeur de travail ou un voisin ou un proche qui mène son propre combat, lutte contre un cancer, se sépare ou a perdu son emploi. Cessons de chiâler parce que cela va pas assez vite sur l’autoroute et prenons soins de nous, les uns les autres! Travaillons ensemble comme vous faites et on arrivera tous à rendre ce monde meilleur à chaque jour!
A chacun de ceux que vous aidez, vous rendez leur vie meilleure. Merci à vous tous et encore une fois Bravo, lâchez pas! A la vida! P.s. Go Paden Go ! Bisou. Annie Tremblay
michele turcotte
15 janvier 2012 at 15:41 //
Pas croyable, quand on co-habite avec la souffrance,,,surrement que les priorités font un bon monumentale. A regarder tout l’argent que l’état investit dans toute sorte de programme,,parfois plus qu’inutile, Combien de vie s’envole a chaque minutes, Combien serait sauver si la priorité de chaque pays industrialisé serais d’abord et avant tout de sauver la planète avant d’essayer d’aller marcher sur les autres,,,J’ai beaucoup d’admiration pour vous. Continuer a répandre l’espoir dans les yeux de ces personnes. Les anges n’ont pas tous des ailes et l’immortalités ,,
aida mbodj
15 janvier 2012 at 16:26 //
On a l’impression de mettre un plaster sur un cancer :S
Louise Claveau
16 janvier 2012 at 11:09 //
Combien de gens pourrions-nous sauver si on donnait seulement 1,00$ par personne. On a le culot de se lamenter sur bien des choses peut-être que plusieurs personnes devraient faire ce voyage et que ces gens verraient que l’on se lamente pour rien. Je vous félicite pour les chroniques. Dites à tous que je les trouves SUPER et d’une très GRANDE GÉNÉROSITÉ. Encore mês félicitations Marc
Jacinthe desbiens
16 janvier 2012 at 19:46 //
Bonjour groupe fantastique et généreux…Quel contraste nous vivons. Ici, le froid et la neige et chez-vous le sable et la chaleur! Merci beaucoup M. Marc de nous permettre de vous suivre et de lire vos commentaires si bien écrits. Saluez particulièrement mes deux amies Danielle et Audrey,dites-leur que je les aime et j’ai hâte de les revoir.Bonne continuation !
Jacinthe Desbiens