Haut les mains.
— Bonjour, est-ce que peux parler au responsable de la publicité de votre entreprise?
— C’est moi… (En fait, vous auriez demandé le concierge, la secrétaire, la comptabilité, la production et j’aurais toujours répondu la même chose…)
— Bonjour, mon nom est ******, policier dans votre municipalité, et nous sommes à monter une publication…
— Haaaa… (Finalement, je me demande si j’ai vraiment les qualités nécessaires pour être un bon responsable de la publicité, j’ai comme un gros doute soudainement…)
—… une partie des fonds amassés servira à une maison des jeunes, bla-bla-bla…
— Je m’excuse, ça ne m’intéresse pas… tentais-je du bout des lèvres… (Honnêtement, la vérité, je n’en ai rien à cirer de votre truc…)
—… vous savez, notre format carte d’affaires est présentement en réduction et c’est une belle opportunité qui s’offre à vous de donner un peu à votre communauté…
—… heu, vous savez, je donne pas mal de mon temps, de l’argent aussi, j’aide beaucoup de causes en offrant souvent mes honoraires… (Oui, oui, je sais que tu n’en as rien à foutre et que tu ne me crois pas une miette, mais je te le dis quand même…)
— Je n’en doute pas, mais vous savez, la jeunesse c’est important…
—… je ne dis pas le contraire… (En fait, je le sais parce que la mienne me quitte de plus en plus et que ce n’est pas facile à vivre!…)
—… en prenant un espace publicitaire, votre entreprise s’engage envers cette jeunesse…
— (silence)…
—… de plus, comme je vous ai dis auparavant, notre format carte d’affaires est drolement économique et c’est notre meilleur vendeur…
— Je m’excuse, monsieur (la police…), mais comme je vous disais, moi aussi (ça fait déjà deux fois…), je vais passer mon tour (encore, cette année, l’an prochain aussi tiens, et pourquoi pas toutes les années bissextiles, tant qu’à y être…)
—… les problèmes tels que la drogue chez les jeunes, ça ne vous touche pas, finalement… si je comprends bien?
—… heu, pas du tout! Heu, en fait, oui ça me touche… mais vous mélangez tout, là… (La vérité c’est que j’adore voir les jeunes se défoncer, surtout à la colle : vous savez, nous les vieux graphistes avons longtemps abusé de la colle en aérosol et ça nous rappelle le bon vieux temps quand on voit des jeunes s’en mettre plein les narines! – – – > coudon tu me prends pour qui???)
— Bon, je ne vous ferais pas changer d’avis, je pense…
— Non, désolé ( à moins de me passer les menottes et me traîner jusqu’au poste…)
— Clic.
J’ai déposé mon téléphone. Mon humeur oscillait entre le mépris… et la culpabilité. Même si sa méthode de vente était démagogique, le policier avec son assurance venait de me placer dans une situation d’introspection. En jouant sur le sentiment de culpabilité des gens, des corporations réussissent à combler leur agenda, revue, magazine en nous vendant de la pub sous le couvert des bonnes causes. Je ne dis pas que ces gens s’en mettent plein les poches au profit des causes qu’ils défendent, mais ils nous font passer pour des gagnes-petits, des égoïstes quand on leur dit non. Les causes qu’ils mettent d’avant ne sont jamais de mauvaises causes. On s’entend pour dire que de l’argent, tous les organismes communautaires en ont besoin… surtout en période de récession. Mais il y a une façon de solliciter le monde. Qu’on passe par les maisons, qu’on nous arrête aux sorties des épiceries, je trouve ça OK. Je l’ai déjà fait et ce n’est pas facile, mais que l’on nous regarde de haut, qu’on nous juge quand on passe droit, ça ne passe pas. À moins d’être devin, comment pouvez-vous savoir qu’est-ce qu’une personne fait comme bénévolat? Combien une personne donne par année à des causes dont vous ne connaissez même pas les noms. Vous seriez peut-être surpris. Et ce n’est pas tout le monde qui veut que ça se sache non plus. Conclusion, monsieur le policier, ce n’est pas parce que ma carte d’affaires n’apparaîtra pas dans votre agenda que la cause des jeunes ne me tient pas à coeur.
alain bouchard
2 juin 2009 at 10:19 //
méchante façon d’aborder les gens …. ça me fait penser aux »réhabilités » qui passent aux maisons pour vendre des crayons . On a tellement peur Que L’on ne sait pas quoi faire .
Le forcing doit cependant fonctionner avec plusieurs……surtout venant d’un gentil policier .
Martin Larose
2 juin 2009 at 10:58 //
…y’a un lien avec ton blogue précédent…
Janick
2 juin 2009 at 14:53 //
Hier je suis allée au magasin avec une amie qui s’est acheté des souliers. La vendeuse lui a demander au moins cinq fois, de cinq manières différentes, si elle voulait donner pour le téléthon. Mon amie qui est très généreuse et qui s’implique dans toutes sortes de causes lui a précisé dès le début que son don au téléthon était déjà fait.
La vendeuse lui a répondu que c’était pour le téléthon de l’an prochain… pas moyen de s’en sortir ! Est-ce qu’un gentil non ne devrait pas suffire…..
marc
2 juin 2009 at 18:48 //
@ alain et janick
En vous lisant, je me rends compte que l’on a tous ce genre d’histoires. Je ne sais pas pour vous, mais moi la culpabilité décolle assez vite! Je me sens cheap, et c’est là que les autres en profitent. Et c’est ça qui me laisse un goût amer. Donner par écoeurement plutôt que par conviction… et plaisir.