Le vide

TM-Marcface– Tu es certain que ça va? Ton dernier texte m’a fait peur, tu sais…
– C’est le premier texte que tu écris que je n’aime pas…
– Hey Marc, pas te connaître, je me dirais le mec qui a écrit ça, va se suicider.

Des remarques sur mon précédent billet.

Un texte que je pensais avoir écrit au second degré. Exagérant mes travers. Amplifiant un matin où tu te lèves du mauvais pied. Ce texte, même si senti, était bourré de clichés. Oui, un billet d’humour noir, mais surtout un texte qui détonnait avec l’image que je projette.

M. Sourire.

Positif. Posé. Rigolo. 

L’image que je projette. 

Ça paraît bien.

J’ai pourtant une part de moi plus sombre. Plus cachée.

Que je garde pour moi. La plupart du temps.

Ça vous surprend?

Hier, un ami annonçait sur Facebook qu’il prenait un congé au travail. Congé de maladie. Dépression ou burn-out. Impossible de savoir.

J’ai aimé lire ce statut.

Pas aimer qu’il soit malade. Ça, je n’aime pas. Mais d’écrire qu’il l’était, j’ai trouvé le geste beau. Et important. Parce que ce n’est pas une tare. D’être dépressif, angoissé, en détresse. Ni un truc tabou qu’il faut cacher à tout le monde. Non. Pas plus qu’il ne faut cacher qu’on est diabétique.

La maladie mentale est une maladie. Point à la ligne.

Une maladie qu’il faut soigner, certes, mais avant tout démystifier.

Une maladie qui se contrôle. Guérir? Je ne sais pas. Je ne suis pas médecin. Mais d’avoir la possibilité d’en diminuer les impacts négatifs sur sa vie et celles de ses proches, ça, j’en suis certain.

À la mort de ma sœur, mon père a sombré dans une dépression. Incapable de vivre les émotions qu’un tel drame apporte. Pas outillé sentimentalement, il a tombé dans le vide.

Comme on peut se noyer dans un chagrin trop profond. 

Des amis autour de moi ont vécu ou vivent, eux aussi, des épisodes plus noirs de leurs vies.

Certains en vivent encore au quotidien. Un combat souvent difficile pour les uns, mieux contrôlé pour les autres.

Les gens que je connais qui sont aux prises avec le vide n’ont pas de points en commun par rapport aux causes de leurs désarrois. Non, ce ne sont pas tous des workholics, non ils n’ont pas tous vécu des peines d’amour, des mortalités ni de grandes déceptions, mais ils ont en commun un débalancement chimique au niveau du cerveau. Ça parait bête de dire ça comme ça, mais voyez ça comme le sucre par rapport au diabète.

Non, ce ne sont pas des personnes faibles. Ho non. Je peux vous parler de mon chum fort comme un bœuf, avec des mains grosses comme ma tête. Ni non plus des crétins. Je peux vous parler de cet autre ami, brillant dans son domaine, un chef de file, un chercheur. Comme cet autre, ce musicien, capable d’exprimer ses sentiments dans son art, mais incapable de les gérer par lui-même.

En y pensant bien, ces gens ont tout de même un point en commun. Celui d’avoir pris la décision d’en parler à leurs proches. Je ne veux pas utiliser le mot « courage » parce cette notion rapporte trop à un geste hors du commun. Alors que je pense qu’il faut davantage démontrer qu’en parler devrait être facile. Qu’aucun jugement ne viendra interférer avec ces confidences. Et c’est la clé importante. Nos jugements. Ou plutôt notre absence de.

Moi? 

Je sais pas. 

Mais il me semble que je serais dispo à ça. Il me semble avoir tout ce qui faut pour tomber dans le vide. Des années de reflux sentimentaux, des bogues de moi par rapport à moi non réglés, une masse de travail hors-norme, un manque de sommeil chronique, etc. Il me semble que j’ai à l’intérieur de moi tous les ingrédients dont un gars a besoin pour se concocter un passage à vide. Un cocktail à saveur de remise en question. 

Et si ça m’arrivait, une chose est certaine : je ne voudrais surtout pas qu’on me juge.

Toi?

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3 commentaires

  • Ouff Marc sa fait drôlement réfléchir ce matin, merci de nous bousculer un peu

  • Ah! Que je comprends pour y être passée à quelques reprises! Mais je peux te garantir qu’il y a toujours une lumière au bout du tunnel! Et la Vie prend toujours de valeur et de sens quand on a vécu ce sentiment TRÈS FORT d’impuissance et de dépossession de soi.

  • Il faut se dire ces trois mots….trois mots qui souvent m’ont empêchée de tomber dans le vide:  » Pour le moment »….

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