Vieux con.

Je ne pensais vraiment pas que j’étais rendu là. Je savais que je vieillissais de jour en jour, mais j’étais certain que c’était uniquement la carcasse qui prenait de l’âge (« … et du poids… » – hey, je vous ai entendu!!!). J’étais convaincu que je ne tomberais jamais dans le panneau. Jeune, je haïssais ce genre de discours. Les grandes affirmations qui commençaient par « Dans mon temps … ». Ben oui, mon oncle, ben oui. Dans ton temps, tout était mieux, dans ton temps tout était parfait, dans ton temps, vous étiez mieux que nous. Je haïssais ça à m’en confesser. Les fameux discours générationnels. Les générations d’avant qui pensent que les générations d’après sont moins ceci et plus cela. Il faut dire, pour en ajouter, que je fais partie de la génération X. Cette super génération incomprise serrée entre les géants boomers et sa princesse descendance Y. Ce X qui nous a marqués au fer rouge. Le même X que l’on voyait appliqué sur nos devoirs quand le prof voulait nous montrer que l’on s’était gouré et qu’il fallait recommencer. Recommencer est le mot d’ordre de cette génération : recommencer un nouvel emploi, une nouvelle relation, etc. Mais je m’éloigne là. Je disais que je ne pensais jamais que j’allais un jour, moi aussi, commencer à tenir des discours « dans mon temps… ». Ce n’est pas que j’ai voulu, cela m’a sauté aux yeux en regardant ce magnifique film : Maman est chez le coiffeur. Magnifique film par son esthétisme : la photo y est tellement belle, mais magnifique, aussi, par le jeu des jeunes comédiens qui interprètent des enfants des années soixante. (Vous me voyez venir, là hein?). En résumé, c’est l’histoire d’une femme (l’excellente Céline Bonnier) plaquant mari et enfants qui décide d’aller travailler à l’étranger. La situation serait banale aujourd’hui mais l’action se déroule en 1966. L’histoire nous est racontée par les enfants. Des enfants en 1960. Des enfants habillés de polyester et ratine de velours, avec des pantalons trop courts et des chandails de laine qui pique. Des enfants qui jouaient avec rien. Des enfants qui vivaient en parallèle de leurs parents. Des enfants qui vivaient leur vie d’enfant. Point. (Si vous ne me voyez pas venir, c’est que a) vous avez cessé de me lire (votre patron vient peut-être d’entrer dans votre bureau; b) vous regardez seulement les images de ce blog ou c) vous êtes né après 1980. J’ai retrouvé dans ce film, ma jeunesse; une jeunesse tellement différente de celle de mes enfants et de leurs congénères. Une enfance sans technologie, sans 2000 stations de télé, sans ipod, sans internet… Un jeu en réseau, c’était un jeu de quartier. Avec des vraies personnes. Une enfance avec les vieux vélos de nos cousins, frères, voisins. Nos vélos qui pesaient 200 livres. Les même 200 livres que pesaient les appareils dentaires de l’époque. La télé sur le UHF. Les cartes de hockey et la gomme dure qui faisait gricher des dents. Les mille et un personnages interprétés avec le même bâton comme objet. Nous étions tellement naïfs. Trop? Je ne pense pas. Aujourd’hui, les jeunes me semblent plus blasés qu’en notre temps. Désillusionés. Mmmm. Je pense vraiment que je deviens vieux. Un vieux con.

Maman est chez le coiffeur de Léa Pool.

2 commentaires

  • 12 juin 2012 at 14:58 //

    Il m’a fais rire ce texte aujourd’hui!!! Et oui si on énumère un peu les avantages de «dans notre temps» on devrait comprendre bien des choses..
    Merci

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