Chroniques helléniques – partie 3

En relisant mon dernier billet, j’ai ressenti un certain malaise. De ceux qu’on a quand on se rend compte que ce qu’on a écrit en 600 mots auraient pu se résumer en 25 derrière une carte postale. Des balivernes. Des mots qu’on aligne un après l’autre pour rassurer les proches, des mots clichés sans saveur. Il fait beau, on pense à vous. Mon dernier billet avait le sex-appeal d’un Guide Michelin et goutait l’agenda. Voilà, c’est terminé. N’en parlons plus. Parlons désormais des vrais affaires:il faut beau, on pense à vous.

Miam.
Quand je reviens de voyage, il ne faut pas me demander ce que j’ai vu ou fait, il faut m’interroger sur ce que j’ai mangé. À Athènes, un resto trouvé grâce à mes recherches sur internet, Kuzina, a réussi a bouleverser mes papilles. Le restaurant réinvente la cuisine grecque, puisant dans sa riche histoire des recettes oubliées ou de nouvelles interprétations de classiques, et ce, toujours avec un souci d’utiliser des aliments frais de provenance. C’est ici que j’ai goûté pour la première fois à la bottarga, une pâte créée à partir d’oeufs de poisson, salés et séchés que l’on tranche en fines lamelles et réveille d’un filet d’huile d’olive sur un petit pain. Délicieux, ça m’a rappelé un peu l’anchois et la sardine. Je tenterai d’en apporter innocemment dans mes valises.
À Mikonos, en soupant à la Taverna Matthew, j’ai eu la chance d’échanger quelques mots avec une gentille dame d’une table voisine. Grecque émigrée aux States, elle venait passer quelques mois dans sa maison à Ano Mera. Elle a eu la gentillesse après un toast d’ouzo, de m’orienter sur le menu. Les anchois marinés étaient fabuleux! Je pesterai encore pendant plusieurs mois contre ceux que j’achète, même chez Milano à Montréal, en pensant à ce goût sans saumure si savoureux. Je vivrai le même backslach qu’à mon retour de Barcelone. Misère.
De Santorini, je ramènerai des feuilles de câpres. J’aurais bien ramené des tomates, mais je doute que Douanes Canada approuve. Il faut savoir que le volcan n’a pas que laissé un paysage à couper le souffle à cette île grecque, son sol ravagé par la lave a vu son ADN se modifier. Sa terre devenue très fertile a développé des saveurs que l’on ne retrouve nulle part ailleurs; aubergine blanche, tomate miniature a peau croquante, fava, etc. Même chose pour les fromages; depuis mon arrivée j’ai mangé du feta tous les jours, sans jamais avoir eu l’impression de manger le même fromage. J’en bave à en parler.

Des kilomètres de mots.
Y a pas que la bouffe qui me fait vibrer depuis que j’ai posé le cul ici. Ça n’a rien à voir avec le pays, mais avec mon état d’esprit. J’ai repris le goût à la lecture. Pas que je l’avais perdu, mais je ne lisais que des trucs reliés au travail, des magazines, etc. Je m’apprête à entamer les romans de ma blonde, je suis venu à bout des miens. Des milliers de pages englouties voracement, je m’en voudrais de passer sous silence Middlesex . Ce roman racontant l’histoire d’un hermaphrodite et plus largement l’histoire d’une famille : des immigrés grecs arrivés aux États-Unis en 1922 après avoir fui leur ville natal envahi par les Turcs. Des terres d’Asie Mineure aux quartiers de Detroit, Jeffrey Eugenides, celui à qui l’on doit Virgin Suicides – mis en film par Sophia Coppola, dresse un portrait de l’Amérique des années 20 aux années 70. Un livre difficile, mais terriblement beau. Trouvaille qui allait parfaitement avec ma destination. Il parait que le goût d’écrire vient avec celui de lire. Ça me donnera le coup de pied au cul pour cesser de négliger ce blogue.

Sinon, en 25 mots : il fait beau, le paysage est époustouflant (marcher la dizaine de kilomètres à flancs de montagne, reliant Fira à Oia, pour y voir mourir le soleil dans la mer Égée fût génial) et on a hâte de vous revoir (pfff, quel menteur!).

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