Le gavage.

Vous recevez une demande d’amitié Facebook d’une entreprise. Bon. Vous savez que ce n’est pas la procédure normale. Qu’une entreprise devrait plutôt se créer une page qu’elle moussera dans son réseau pour la faire connaître afin d’y recruter le plus d’adeptes possibles. Vous déciderez vous-même d’y adhérer et même jusqu’à la partager à vos propres amis si vous pensez que ça leur conviendrait à eux aussi. Mais bon, vous vous dites que l’entreprise qui sollicite votre « amitié » n’est peut-être tout simplement pas au courant et vous faites : bah, ce n’est pas la fin du monde en cliquant « accepter » pour augmenter votre propre réseau.
Les jours passent et cette entreprise vous sollicite à un événement. Une activité pour mieux connaître ses services. Un genre porte ouverte. Vous cliquez que « non », vous ne serez pas présent. Ça ne cadre pas dans votre horaire. Et vous n’avez pas vraiment le goût. Vous êtes plutôt fermé aux portes ouvertes… Deux jours après, le même nouvel ami-entreprise vous demande si vous aimeriez essayer un truc qu’il vend. Qu’il serait disponible pour vous en faire une super démonstration! Une autre belle façon de mieux vous connaître. Vous cliquez « non ». Sans plus. Ça n’est pas votre truc tout ça. À vrai dire, ça vous dérange. Le lendemain, cette entreprise vous rappelle sur votre mur Facebook que vous pouvez toujours profiter d’un paquet d’avantages si vous venez acheter chez lui! Vous vous en doutiez. D’ailleurs, l’un de ses avantages est de ne jamais avoir la paix. Vous hésitez entre le désamifier ou simplement l’ignorer. Vous choisissez la deuxième option en espérant que votre silence lui donnera une piste de votre désenchantement. C’est mal connaître la détermination de votre super ami. Les jours se suivent et se ressemblent. D’invitations des plus anodines aux questions les plus stupides en passant par une avalanche de liens encore plus insipides et inintéressants, il continue à vous bombarder de conneries testant vos limites… à leur limite. À bout de patience, vous cliquez sur désamifier et vous voilà enfin soulagé. C’était un bon gars, mais bordel qu’il vous a gonflé avec cette sollicitation extrême et impertinente.
Pour vous relaxer de cette mésaventure, vous commandez en ligne des livres. Vous êtes plutôt pressé, vous omettez de cocher sur les cases qui vous épargnent de recevoir par courriel les nouveautés, coups de coeur et ventes de l’année. Vous vous dites : pourquoi pas? Ça pourrait êre pratique de recevoir toutes ces mirobolantes offres. Et vous cliquez « envoyer » en savourant ce plaisir simple de magasiner en bobettes sur le sofa du salon, pendant qu’il neige en ce début de juin. Le lendemain, vous recevez un courriel de ce commerce en ligne, vous disant qu’au-delà d’un achat de 39 $, la livraison sera gratuite. Cool. Même si vous le saviez déjà. Puisque vous venez justement de commander. La veille. Hier. Il y a à peine 24 h. Pour plus de 39 $. Et que vous n’avez justement pas payé de shipping. Se succèdent les jours suivants : la sélection des livres que vous pourriez aimer, la sélection des livres de la fête des Pères/mères/amoureux/Noël du campeur/ramadan/,etc… Puis suivent les promotions à 10 %/20 %/30 %. Et toujours cette livraison gratuite au-delà d’un achat de 39 $. Vous passez tellement de temps à lire ces courriels que vous n’avez même plus le temps de lire les livres que vous avez commandés. Quand vous décidez que c’est assez. Vous vous connectez à votre compte et vous décochez toutes les cases qui leur permettent de vous emmerder.
Y a cette compagnie de vêtements qui vous embêtent tous les jours qui vous déclinent leur collection un morceau à la fois, ce magazine qui vous offre de vous abonner tout le temps (même si vous l’êtes déjà!!!), ces recettes qui vous arrivent tous les matins… et le sempiternel envoi gratuit à l’achat de 39 $.

D-O-S-E-R. Sachez doser. Cessez de gaver vos clients. Ça leur engraisse la foi qu’ils peuvent avoir en vous. Laissez-les digérer les infos que vous voulez leur transmettre. Trop, c’est comme pas assez. Doser.

Je le sais que vous voulez des clients. On en veut tous. Mais ce n’est pas en les écoeurant à outrance que vous les attirerez. Facebook, les courriels, les infolettres, sont tous des moyens géniaux et à peu de frais de solliciter une clientèle, mais de grâce faites la différence entre partager et agresser. On se faisait une drôle d’image du vendeur d’assurances qui mettait son pied dans la porte pour empêcher le client de la fermer, mais quand vous ne cessez de pousser jour après jour des offres (qui souvent n’en sont même pas) vous vous faites plus de tort que de bien et leur ressemblez.

Savoir doser son information. La rendre intéressante, originale, mais surtout pertinente fera de vous, une entreprise plus respectée. Pas une machine à envoyer des courriels. Bon je vais aller vérifier si l’offre de 39 $ — livraison gratuite — tient toujours….

3 commentaires

  • 3 juin 2011 at 7:54 //

    tu as entièrement raison Marc! la modération a bien meilleur goût! Un prof en design d’intérieur me disait il y a 30 ans que: lorsque tu enlèves un élément dans un concept d’aménagement intérieur et qu’il ne manque pas, c’est qu’il était de trop! c’est toujours vrai aujourd’hui et ça s’applique aussi à Facebook
    et tout concept de pub!

  • Merci!
    Ça me rappelle vaguement une conversation que j’ai eue hier :))

  • @ anonyme : «The design is finished when you’ve removed the last element of confusion» – Craig Frazier

    @ Nancy : on ne pourra pas dire que je n’ai pas de la suite dans les idées!

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