Savoir rebondir.

L’échec est une façon différente d’atteindre le succès. Ce n’est pas la plus logique d’y arriver, j’en conviens, mais elle ne représente pas une fin en soi. Un échec, c’est plutôt le début de quelque chose de nouveau. Un renouveau. Et c’est normal. Puisque l’on a raté un truc, il faut donc changer certaines façons de faire si l’on veut réussir, c’est plutôt logique, non?
Dans le métier que j’exerce, l’échec fait partie intégrante du processus de création. On émet des idées à un client qui les reçoit et perçoit de manière positive ou négative. A t’il toujours raison? Non. Ça serait trop facile. Mais en contrepartie, présentons-nous toujours, nous les créatifs, la meilleure solution possible? Non plus. Le métier de création en est un d’interprétation, de perception, de culture et de goût. Il se peut que l’idée proposée soit la meilleure possible, mais qu’elle soit rejetée de toute façon, comme il se peut qu’elle soit retenue même si elle est une mauvaise idée. Win a Few, Lose a Few. Ça s’égalise comme dirait l’autre. L’échec, qu’il soit provoqué par les autres ou par soi-même, mène à un unique résultat : celui de devoir se renouveler, de refaire ses devoirs. Savoir rebondir, quoi.
Se faire refuser un concept, c’est chiant. Mais ça fait partie de la game que tu joues avec ton client. Se faire refuser un concept, ça arrive plus souvent quand on joue sur la corde raide de l’originalité; faire constamment les mêmes trucs, copier les autres, ne pas sortir des sentiers battus, mène rarement à l’échec. Ni au succès, honnêtement.
Se faire refuser un concept, ça fait mal. À son égo. Ça veut dire que l’on critique votre talent, vos idées, vous-même. Mais c’est surtout simplement un constat que ce que vous avez tenté ne fonctionne pas, alors il faut le changer. Même si vous demeurez convaincu du contraire.
Dans l’exemple que j’illustre ici, j’avais été mandaté par la Caisse Desjardins de Chicoutimi pour créer un logo commémoratif pour leur centième anniversaire. Après avoir esquissé un paquet de trucs, j’ai voulu me rapprocher le plus du logo corporatif de Desjardins, cette espèce de ruche formée par des losanges. À partir de cette forme géométrique, j’ai réussi à créer deux 0 et un 1 en utilisant le négatif de la forme. En jouant ces formes, j’ai construit une petite maison représentant grossièrement une caisse. Par extension l’ouverture du toit laissait interpréter une petite tirelire. Bref, mon processus créatif était à point. Mon concept tenait la route, était esthétiquement défendable et répondait parfaitement au besoin du client. J’avoue qu’il me plaisait beaucoup et c’est donc sans hésitation que j’avais décidé de présenter ce logo à mon client.
Bien reçu par le département des communications, il devait subir quand même quelques épreuves avant d’être accepté, entre autres celle de recevoir l’aval d’un comité de direction, etc.
La réponse fut négative. Pas parce que le logo ne plaisait pas, mais sa trop grande interprétation et ressemblance de la signature de Desjardins a été jugée irrecevable par la Fédération des Caisses. C’est écrit noir sur blanc dans leurs normes graphiques qu’il était non-négociable de créer une signature à partir du logo corpo. Échec.
Il fallait donc recommencer le processus de création du début. Il fallait rebondir.
Ce qui est difficile lorsqu’on se voit confronté à ce genre de résultat, c’est de faire table rase sur ce que l’on avait fait auparavant. Chasser le plus vite possible l’idée que tout ce que vous créerez pour remplacer votre ancien concept ne sera jamais aussi fort, aussi créatif que l’idée refusée. Et c’est là le piège dans lequel trop souvent tombent les jeunes créateurs. Penser que l’idée refusée était l’ultime. Que tout ce qui suivra ne pourra qu’être moins bon. Au contraire. Je répète souvent que la création nait des contraintes. L’échec c’est le summum comme contrainte. Il est le dead-end qui nous force à faire marche arrière pour mieux avancer. Pour aller plus loin.
En reprenant mon crayon, j’ai redessiné cette signature, illustrée plus bas, en créant deux C, pour Caisse de Chicoutimi, qui forment les deux 0 de 100. Plus simple, plus festive et cohabitant plus facilement avec la signature de Desjardins, le logo fût rapidement accepté par le comité.
Avec du recul, j’aime beaucoup plus cette signature et demeure convaincu que le client a bien fait de refuser le premier concept. Non pas parce qu’il n’était pas bon, mais qu’il fallait passer par là pour créer mieux.
Savoir rebondir, ça permet de dépasser ses limites et de transformer un échec en succès. Pour faire mieux.

Bon centième à la Caisse Desjardins de Chicoutimi qui a su, elle aussi, rebondir et se réinventer à travers ses cent ans d’histoire!

6 commentaires

  • 8 avril 2011 at 14:03 //

    Wow 🙂 Tellement vrai et j’adore ce que tu fais continue !

  • 8 avril 2011 at 15:56 //

    Exact, Félicitation, chiant, mais les vieux comme nous, ca se remonte vite, car ont passe la semaine a crée donc, pourquoi pas encore une autre après un refus, le secret,.. etre fondamentalement positif a tout point, les vieux grincheux lache, abandonne, pousse cela dans la cours des autres, pas nous ! ont recule et ont redécole, viva la conceptionnne, félicitation marc, le premier, un peux complexe sur tout les point,, un 100 iem c’est simple finalement ! SUPER tes le meilleur…. ;0)

  • @ Véro : Merci !
    @ Charles : j’aurais eu le goût de corriger ton texte, vieux par expérimenté pas exemple 🙂 merci du commentaire!

  • Les 2 logos sont simplement BRILLANTS!! J’ai bien aimé la partie sur la difficulté de créer quelque chose de différent après un refus…C’est l’histoire de ma (jeune) vie!! Même si je suis encore aux études, c’est mon plus gros problème! J’adore ce billet, il vient de me donner une  »ptite tappe dans le dos » pour finir mon MAUDIT projet de pochette CD haha 🙂 Merciii!

  • Merci Pascale! Si j’étais prof, je refuserais systématiquement un excellent travail pour voir comment un étudiant peut arriver à se réinventer…

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