Vive les nouvieux clients.

illusionDepuis que j’ai quitté Bell au profit de Rogers pour mon service cellulaire et de Vidéotron pour ma ligne résidentielle, il ne se passe pas un mois sans qu’on m’envoie une lettre me confiant à quel point je suis fin, beau, gentil et qu’on s’ennuie de moi comme ce n’est pas possible. Je les comprends. Vous-même, vous ne passez pas trop de journées sans venir me trouver sur ce blogue… si si si , les statistiques de Google en font foi. L’entreprise Bell est tellement en manque de ma clientèle que les missives qu’elle me fait parvenir sont à la limite de me faire pleurer. J’ai larme à l’oeil. Je leur manque, comme un vieil ami qu’on a négligé. C’est à la limite jouissif d’y penser. Lorsque j’étais client chez eux, la seule lettre que je recevais était mon état de compte salé du mois. C’est tout. Pas un petit mot doux. Pas de boni. Une simple (façon de parler…) facture à régler le plus rapidement possible, s’il vous plaît, sans dire merci. Ou sans merci, devrais-je dire. Si seulement Bell s’arrêtait là. Elle pousse l’audace de m’offrir des forfaits incroyables. Des offres de réabonnement tellement alléchantes que je me demande comment l’entreprise fait pour se taper une campagne de pub aussi criante avec le peu de frais qu’elle ose charger… à ses nouveaux clients. Parce que vous l’avez compris, ces fabuleux forfaits m’ont été offerts uniquement après que notre relation fût du passé. Ces offres mirobolantes sont pour les nouveaux. Pas pour les vieux. Pour attirer la chair fraîche. Pas pour de l’acquis. Gens de Bell, rassurez-vous, vous n’êtes pas la seule entreprise à tomber dans ce type de combine. Combien d’offres, de rabais, de meilleurs taux de crédit avez-vous droits quand vous entrez pour la première fois dans un commerce? Combien de fois après avoir lancé en bravade vouloir quitter une institution, une boutique au profit d’une autre que tombent à vos pieds des cadeaux, des marques d’amour et une soudaine compréhension que vous n’êtes pas de la crotte. Je me plais à dire qu’une organisation peut avoir les mêmes qualités et les mêmes défauts qu’une personne en chair et en os; comme elle, elle a tendance à préférer la nouveauté au passé. En service professionnel, c’est pareil. Les nouvelles relations d’affaires sont palpitantes, on recommence à neuf, on n’a aucune tache à nos dossiers, aucune erreur de parcours. Une vieille relation d’affaires peut avoir connu quelques ratés, avec à son actif quelques prises de bec, des malentendus, des retards, mais surtout un historique difficilement effaçable. Une relation victime de ses mauvais comme de ses bons couts (ou coûts)… C’est normal et anormal. Un client qui te suit depuis plusieurs années devrait être ta priorité numéro 1. Prends l’énergie que tu déploierais pour en trouver un nouveau et donne-lui pour le garder. Je suis abonné depuis presque vingt ans à un magazine. Chaque mois, je vois passer des offres d’abonnement (réservées aux nouveaux) et ça me fait chier. Parce que moi, le cave, je paie pour ma fidélité. Frustré, j’ai fait parvenir un courriel au service de l’abonnement en leur expliquant mon point de vue. Très courtois, ils m’ont donné raison en m’offrant le même nanane auquel le nouvel abonné avait droit. Si j’étais content? Pas vraiment. Il aura fallu que je me batte. Que je chiale. Que je lève un grief. J’en ai marre de tout ça. Prenez les devants. Surprenez-moi. Montrez-moi que je suis important à vos yeux. Je voudrais recevoir par courrier un merci et un mois gratuit de mon service internet, ou de télévision de temps en temps. Je voudrais recevoir un mois d’abonnement gratuit quand je suis chez vous depuis des décennies. Je voudrais recevoir le cadran-réveil que vous offrez à vos nouveaux clients. Donnez-moi votre meilleure table. Payez-moi un verre. Dites que je suis important pour vous. Et prouvez-le. Parce que j’ai cru en vous dès le départ. Parce que je vous fais un chèque chaque mois sans rechigner. Parce que je vous suis même si vous n’êtes pas toujours gentil avec moi. Ne me dites pas que je suis important seulement quand je vous quitte. Ne me donnez pas uniquement quand je le demande. Faites-moi sentir nouveau même si je suis vieux. Faites-moi sentir comme un nouvieux client.

> Illusion d’optique : vieille ou jeune? À vous de décider.

7 commentaires

  • Je crois que nous vivons tous les mêmes frustrations que toi. Et c’est la même situation quand tu es employé, les promotions ou offre alléchante se présentement rarement, ou ne viennent pas spontanément. C’est seulement si un bon employé décide de quitter que celui-ci va se voit offrir mer et monde pour demeurer à son poste.

  • 28 mai 2009 at 11:34 //

    service…service…. un seul mot pour en dire long . Quand on est dans une entreprise de services , on se doit de rendre service…..pas tout le monde qui comprend ça . Mes meilleurs et plus anciens clients ont droit à un service qui leur prouve que je les apprécie et les aime comme clients .
    J’allais dans un restaurant 3 fois par semaine et on me prenait pour acquis ; on me servait en dernier en se disant que ce n’était pas grave , que je reviendrais quand même , que je comprendrais , que j’oublierais de me plaindre . J’ai cessé d’aller à ce resto pendant 6 ans même si j’aimais la nourriture . Jusqu’au jour du changement de personnel . Apprécions nos meilleurs clients et les plus anciens , ils nous le rendront …….

  • Encore une fois, très bon blogue ce matin…presque une étude anthropologique.
    Je suis extrêment sensible au sujet car moi aussi, d’une certaine manière, parce que je travaille dans le domaine de l’éducation, je bosse aussi dans le «service».
    J’ai appris, au fil des années, que même le premier contact téléphonique déterminera si je fais affaire avec une compagnie donnée. Il m’est arrivé à plusieurs reprises de tourner les talons dans une boutique ou dans un restaurant parce que l’expression du visage d’un employé était condescendante ou aggressive. Je préfère donner mon argent à quelqu’un d’autre et dans ces cas précis, pardonne-moi l’expression, mais «fuck le régionalisme!». Je crois profondément en ma région, mais si un commerçant croit qu’il peut se permettre de jouer au dominant-dominé avec moi…in a flash, je donne mon argent ailleurs et je n’hésite pas à acheter en ligne. Tu me corrigeras Marc, mais la pub ça commence par les gens qui vendent le produit…
    J’ai eu les mêmes déboires avec Bell…et tu es chanceux toi, ils t’envoient seulement de la pub papier, moi depuis que j’ai tout transféré chez Vidéotron, ils m’appellent une fois par mois.

  • @ guillaume
    Tout à fait. On s’entend que les prochaines années seront déterminantes avec la pénurie de main-d’oeuvre… les employeurs n’auront pas le choix d’être proactif et d’offir mieux.

    @ alain
    Service. Ben d’accord. Proximité. Ça ne veut pas dire d’être voisin, mais d’être très près de son client. Pour mieux le connaître et encore mieux le servir. Tu as raison sur la notion de donner/recevoir. Je pense qu’en affaires comme en amitié, plus tu donnes et plus tu reçois.

    @ martin
    hehe. Une face à claques ça ne te revient pas? Te faire appeler « petit monsieur » par une enfant de 19 ans, non plus? Te faire tutoyer gros comme le bras? Que tu parles du commerce en ligne, je trouve ça intéressant : le service et la différentiation sont les voies de sortie des commerces trads par rapport aux commerces en ligne… pour l’instant. De plus en plus on voit l’arrivée de commerces électroniques de deuxième et troisième génération, avec une vision plus près du consommateur. Le service en ligne est aussi praticable. Je suis d’accord que le chignage ringard du « régionalisme » est dépassé…

  • @ marc
    En fait, je crois que pub et réputation sont soudées dans le monde du service…Et je suis d’accord aussi que la notion de proximité n’a rien à voir avec la proximité physique. La preuve, je fais affaire avec des commerces du centre des États-Unis qui est un coin de pays, on peut le dire, plutôt refermé sur lui-même et on fait souvent un effort pour me trouver un employé parlant français…pour moi la proximité, c’est cela.
    Lorsqu’on revient de voyage, on a habituellement le réflexe de dire deux choses: 1- Quel beau pays, 2- Les habitants sont gentils ou sont chiants.
    Et oui, effectivement, je déteste me faire tutoyer par une «lofteuse» de 18 ans lorsque j’entre dans une boutique pour me vêtir, me faire conseiller sur la boîte électrique de ma résidence ou sur la meilleure robinetterie eco-friendly par un kiddo de 16 ans qui travaille pour l’été dans un magasin de matériaux du coin (et que j’ai eu dans mes classes), sûbir les soupirs d’exaspération d’un rep de compagnie de sono à qui je demande des choses précises et qui n’a jamais monté sur une scène et finalement, me faire demander par un agent d’assurance local si je prendrai des REER cette année lorsque je le contacte afin d’avoir de l’information sur le contrat d’assurance qu’il m’a vendu pour mon fils qui a frôlé la mort la veille et qui est sur la table d’opération.

    La courtoisie et l’écoute du client demeurent les piliers les plus importants dans le monde du service.
    Je serais curieux de savoir à combien se chiffre en termes de dollars une première impression laissée par un commerçant. Positive ou négative.
    🙂

  • 2 juin 2009 at 9:39 //

    J’ai eu le bonheur de vivre l’expérience du « vieux client » hier. Tu as raison pas facile de faire reconnaitre notre fidélité…j’ai dû passer 1 hre au téléphone avec le service à la clientèle de videotron(très bon service en passant) pour arriver à obtenir une promotion réservée au « nouveau client ». À la fin à force d’argumenter j’ai obtenu ce que je voulais, j’en ai quand même profité pour leur suggérer de faire plus attention à leur « vieux client ».

  • @ jean
    Voilà le problème… obligé de chialer pour avoir son dû. Mon défunt père était un spécialiste pour ça. Il ne négociait pas, il exigeait. C’était un terroriste du service à la clientèle. Mais rarement on lui refusait. Mais a quel prix? … Et surtout mépris. Je trouve ça difficile et ennuyant de devoir me battre, j’ai d’autres choses de plus importantes à faire de ma vie…

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